L’Etat – Philosophie

L'Etat bac philosophie 2023

La Liberté - Bac de Philosophie

L’Etat est un concept ancien, si ancien qu’il est dur d’imaginer une société sans État. Pourtant, des philosophes, tels Locke, Rousseau et Hobbes, ont également imaginé un état de nature qui aurait précédé son avènement. Dans cette vidéo, Alyse t’offre de nombreux savoir afin de répondre à une dissertation, une explication de texte ou un commentaire sur le thème de l’Etat, au programme du bac de philosophie. Que tu sois en Terminale ou que tu découvres cette vidéo pour le plaisir, accède aux pensées des anarchistes, des contractualistes, de Nietzsche et de bien d’autres penseurs qui ont étudié l’Etat. Peut on imaginer une société sans Etat ? Si l’Etat est souverain, et donc qu’il ne dépend d’aucune autorité supérieure, qu’est-ce qui nous protège de lui ? Quel serait l’Etat idéal ? On tente de t’offrir des axes pour penser à ceci !

Dans cette vidéo, nous aborderons tout d’abord la définition de la notion d’État et les problématiques qu’elle soulève. Ensuite, nous examinerons pourquoi et pour qui il faudrait se passer de l’État. Nous verrons également que l’État semble nécessaire malgré les contraintes qu’il nous impose. Enfin, nous nous interrogerons sur quel est le type de régime idéal, si cela est possible, et nous étudierons les limites de la démocratie.

I. Définition et problématique
II. Pourquoi faut-il se passer de l’État ?
III. Pourquoi l’État est-il nécessaire ?
IV. Le type de régime idéal
V. Les limites de la démocratie

Mais commençons par définir la notion d’État

I. Définition et problématique

Dans un premier temps, il est important de distinguer deux acceptions du terme “État”. Au sens ancien, l’État est assimilé à la notion de régime politique, par exemple un État démocratique, tyrannique ou monarchique. Au sens moderne, l’État avec un “E” majuscule désigne l’autorité souveraine qui exerce son pouvoir sur un peuple dans un territoire déterminé, comme l’État français par exemple. La souveraineté signifie que l’État n’a pas d’autorité supérieure, même s’il rejoint des organisations internationales comme l’ONU ou l’Union européenne.

L’État correspond donc à deux réalités distinctes : d’une part, c’est un ensemble d’individus soumis à des lois et à une autorité politique, et d’autre part, c’est cette autorité elle-même, qui se manifeste sous forme de structures lui permettant d’exercer son autorité. On comprend dès lors que la notion d’État est en rapport avec la notion de société, du vivre ensemble, de la loi, du pouvoir et donc de la liberté. Elle soulève plusieurs questions : l’État est-il indispensable ? Pourquoi apparaît-il ? Est-il la solution qui nous offre le plus de bonheur et de liberté, ou bien nous opprime-t-il ? Si nous cédons une part de nos libertés à une autorité souveraine, comment pouvons-nous nous assurer qu’elle agira dans l’intérêt général et non dans son propre intérêt ?

Une première problématique soulevée par la notion d’État est donc la question de la limitation de nos libertés individuelles. Si l’État est autorisé à utiliser la force pour faire appliquer la loi, quelle est la meilleure façon de prévenir l’exercice arbitraire du pouvoir ? Comment éviter que l’État abuse de son pouvoir alors qu’il n’est soumis à aucune autorité supérieure ? Cette deuxième problématique soulève la question de la responsabilité de l’État.

Si l’État est autorisé à utiliser la force pour faire appliquer la loi, quel régime devons-nous mettre en place pour éviter que l’exercice du pouvoir ne mène à des modes de domination arbitraires ? Comment l’État peut-il éviter d’abuser de son pouvoir alors qu’il n’est soumis à aucune autorité supérieure ?

Ces questions sont importantes pour comprendre les enjeux de la notion d’État. Voyons tout d’abord pourquoi nous aurions intérêt à nous passer de l’État.

II. Pourquoi faut-il se passer de l’État ?

Il semble que certains auteurs estiment qu’il est plus facile de se passer de l’État si l’on a confiance en l’humanité et son potentiel. C’est le cas de Nietzsche, pour qui le surhomme possède un potentiel créatif illimité, ainsi que des anarchistes, qui croient en la bonté de l’homme et de la communauté. Pour eux, l‘État est un mal radical qui engloutit le potentiel des individus. Nietzsche voit en l’État “le plus froid des monstres froids”, un menteur qui affirme “Moi, l’État, je suis le peuple”. Il uniformise la pensée et écrase l’individualité des esprits libres, valorisant même le travail pour absorber sa force vitale. Il est devenu une nouvelle idole pour avoir la mainmise sur l’individu et servir les intérêts d’une “aristocratie d’argent égoïste”.
Les anarchistes Bakounine et Proudhon prônent carrément la suppression de l’État, affirmant que celui-ci nie les libertés individuelles et rompt la solidarité universelle en créant des frontières. Pour eux, le bonheur se trouve dans la vie communautaire, d’où leur appel à la révolution qui abattra l’État et toute forme d’autorité.
Marx, quant à lui, considère que l’État est au service de la classe qui gère le système économique de notre société. C’est un instrument politique qui permet à la classe dominante de servir ses intérêts et de conserver ses privilèges. Pour ces penseurs, les États en place sont donc incompatibles avec l’expression des individualités, des libertés, mais aussi une vision égalitaire et solidaire des individus.


Cependant, pourquoi vivons-nous dans un État ? Et quels sont les avantages qu’il apporte et qui nous font choisir de composer avec ses désagréments ?

Voyons donc maintenant pourquoi l’État est nécessaire.

 

III. Pourquoi l’Etat est-il nécessaire ?

Pour comprendre l’État, il est nécessaire de remonter à ses origines, tel que l’ont fait les contractualistes Locke, Rousseau et Hobbes en imaginant l’État de nature. L’État de nature est une idée fictive qui permet de penser l’homme avant son entrée dans l’État. Selon Locke, l’Homme était libre, solidaire et cherchait à se conserver. Il ajustait naturellement son comportement aux besoins d’autrui, mais vivait dans la misère et la faim. Avec l’apparition de la monnaie, certains ont commencé à accumuler des richesses, créant ainsi des inégalités et des conflits, faute de juge impartial pour les résoudre. C’est pour cette raison que Locke a estimé nécessaire de créer une entité capable de régler les conflits.

Pour Rousseau, l’homme avant d’entrer en société était naturellement bon. Mais avec l’augmentation du nombre d’hommes, des catastrophes écologiques et l’apparition de la propriété, l’amour propre s’est transformé en égoïsme. La propriété va apparaître ; Rousseau raconte qu’il a suffi qu’un homme déclare qu’une terre lui appartient et que d’autres l’aient cru pour que la propriété naisse.


Les inégalités vont apparaître et la volonté de dominer l’autre va s’accentuer, conduisant les hommes peu à peu à entrer en guerre.

Selon Rousseau, pour éviter la guerre, la création d’un pacte social s’impose. Pour le plus pessimiste, Hobbes, l’État de nature est le règne de la loi du talion,chaque individu est libre d’utiliser tous les moyens pour assurer sa conservation. L’État de nature est un État de guerre et de violence où ne survivent que les plus forts. Il est donc nécessaire d’en sortir.

Ces penseurs considèrent que l’entrée en société était inévitable, car l’État était la seule institution capable d’empêcher les individus de s’entretuer.

Cependant, quel serait le type de régime idéal, le moins contraignant et le plus avantageux ? Vivre dans un État n’implique-t-il pas de renoncer à toutes ses libertés ? 

Il est donc nécessaire d’examiner quel type de régime serait idéal.

IV. Le type de régime idéal

Platon imagine dans la République une cité idéale où seuls les philosophes gouvernent. Toutefois, pour accéder au pouvoir, il faut suivre un parcours semé d’embûches. Platon préconise qu’on soit retiré de sa famille dès son plus jeune âge pour étudier les sciences, puis la gymnastique, et à nouveau la science de 20 à 30 ans, avant de se consacrer à la dialectique jusqu’à 35 ans. Ensuite, on exercera des fonctions sociales, notamment militaires, jusqu’à l’âge de 50 ans, moment où l’on peut accéder au pouvoir si l’on est apte. Pour Platon, le sage est celui qui est en contact avec les Idées et le souverain Bien, et qui ne désire pas le pouvoir. C’est son désintéressement qui lui permet de faire un bon usage du pouvoir. Sa vertu diffuse parmi les citoyens et conditionne l’harmonie de l’État.

En revanche, Machiavel reconnaît au Prince la possibilité d’agir de façon immorale. Il est l’inventeur du concept de “raison d’État“, selon lequel l’État est autorisé à violer la loi ou la morale pour maintenir l’ordre social. Il est central de maintenir l’ordre et le pouvoir en place, car “la fin justifie les moyens”. Le bon Prince, doté de “la ruse du renard” et de “la force du lion”, joue avec son image et est capable de cruauté pour rechercher l’efficacité plutôt que l’authenticité. Il est doté de virtù, c’est-à-dire qu’il possède une intelligence stratégique, du courage et de l’opiniâtreté et sait composer avec les circonstances de la fortune.

Pour Hobbes, seul un État sécuritaire peut maintenir l’ordre et la sécurité des hommes, car à l’État de nature, “les notions de bien et de mal, de justice et d’injustice” n’existent pas, c’est une situation de “guerre de chacun contre chacun”. L’homme n’est donc pas naturellement bon. Le meilleur régime possible est un régime avec un souverain absolu ayant tous les pouvoirs. Le pouvoir peut être obtenu de façon héréditaire, par une élection ou une nomination, et la monarchie absolue est préférable. Les hommes sont assoiffés de pouvoir, et il est donc crucial de maintenir l’ordre et le pouvoir en place dans un régime strict.

Dans la lignée des pouvoirs absolus, on trouve le fascisme, un système politique autoritaire qui associe populisme, nationalisme et un idéal collectif suprême, qui a conduit à des génocides, notamment pendant la Seconde Guerre mondiale. Il y a aussi le totalitarisme, dont l’idéologie prime sur l’individu et vise la domination sans bornes. Dans ces régimes, le parti unique use de propagande et fait régner la terreur. En termes de liberté, de respect de la vie humaine et des individualités, la monarchie absolue, le fascisme et le totalitarisme ne sont pas acceptables.

Examinons maintenant les régimes les plus compatibles avec le respect de nos libertés. Selon Rousseau, l’État naturel de l’homme se dégrade, ce qui le pousse à établir un contrat social avec d’autres citoyens pour former un État. Ce contrat implique que les citoyens abandonnent leur liberté naturelle pour gagner une liberté civile, qui est restreinte et encadrée par des lois, mais réelle. Pour Rousseau, l’État est justifié, souhaitable et légitime seulement s’il préserve le plus grand nombre de libertés individuelles possibles. Ainsi, le régime le plus souhaitable pour lui est la démocratie directe, où les citoyens sont les souverains et créent ensemble des lois pour préserver l’intérêt général. Le gouvernement, dans ce système, a pour seul rôle de mettre en application les lois des citoyens. Cependant, il est difficile de réunir tous les citoyens pour voter chaque loi, et certains penseurs se méfient d’un régime qui donne autant de pouvoir directement aux citoyens. C’est pourquoi Tocqueville et Benjamin Constant ont théorisé la démocratie participative, un régime où le peuple reste souverain, mais délègue son pouvoir à des représentants élus lors des élections. Dans ce régime, les citoyens doivent conserver la possibilité de contrôler l’action des élus.

Dans le même esprit, John Locke conçoit l’État comme un moyen permettant à l’homme de préserver ses droits naturels. Selon lui, le citoyen a le droit de résister si le souverain ne garantit pas sa liberté civile ou sa sécurité. Il préconise également, avant Montesquieu, la séparation des pouvoirs en trois fonctions :
législative (création des lois)
fédérative (assurance de la sécurité extérieure)
exécutive (administration et justice pour faire appliquer les lois).

Cependant, bien que la démocratie soit considérée comme le régime le plus compatible avec l’expression de nos libertés, elle présente également certaines limites

Voyons maintenant les limites de l’État démocratique.

V. Les limites de la démocratie

Tout d’abord, comme l’a souligné Kant, lorsque nous élisons des représentants, ceux-ci peuvent être enclins à vouloir satisfaire leurs intérêts personnels plutôt que le bien commun. De plus, les élus ne sont pas jugés tant qu’ils sont en place, mais peuvent être traduits en justice une fois leur mandat terminé, comme ce fut le cas pour Chirac, condamné pour avoir accordé des emplois fictifs, ou pour Sarkozy, accusé de financement de campagne illégal dans l’affaire Kadhafi ou Bygmalion.

Une deuxième difficulté est la différence entre les promesses électorales et leur mise en place une fois les politiques élus. Cette démagogie est souvent constatée chez les politiciens.



En outre, Marcuse souligne le caractère pervers, inégalitaire et totalitaire de l’État capitaliste. Selon lui, les démocraties sont des régimes autoritaires qui mentent en prétendant permettre l’expression de nos libertés, mais qui visent en réalité à faire des besoins matériels la seule de nos préoccupations. Il en est ainsi dans la société de consommation.

Enfin, une troisième difficulté est la gestion des situations de crise, telles que les manifestations des gilets jaunes, qui ont conduit à des dérives policières et à des blessés graves en France. Selon Max Weber, “l’État détient le monopole de la violence”, mais cela ne signifie pas que ces violences sont acceptables. Les crises telles que la menace terroriste en 2015 et la pandémie de Covid-19 en 2019 ont également conduit l’État à décréter l’État d’urgence, ce qui a restreint excessivement nos libertés et altéré la cohésion sociale.

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Crédits

Autrice et interprète : Alyse Gaultier

Montage et réalisation : Cédric Boulanger

Direction artistique : Tanguy Gaudeul

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